Quand le gouvernement revient sur ses engagements
Quatorze ans après avoir organisé une grève pour obtenir le régime de retraite des cadres, la CGC* se mobilise, tout au long de l’année 1961 pour le défendre.
En effet, un décret du 16 février 1961 permet au gouvernement de fixer désormais arbitrairement le plafond des cotisations de Sécurité sociale et lui ouvre donc ainsi la possibilité de réduire à sa guise les recettes des caisses de retraites des cadres. Le risque est donc de voir les caisses de retraites des cadres se tarir progressivement.
De plus, pour les cadres, agents de maîtrise et techniciens ayant des rémunérations voisines du plafond, cela annihilerait la possibilité de se constituer une retraite décente.
Pour la CGC* de 1961, il faut concilier l’intérêt de l’ensemble des salariés et non les opposer.
Elle demande immédiatement l’abrogation du décret afin de maintenir le plafond de la Sécurité sociale.
Ce qui est en cause, c’est le choix à faire entre un système totalement où l’Etat aura en mains tous les leviers de commande des régimes de retraite ou au contraire un système reposant sur une gestion paritaire.
Les cadres indignés
Les cadres se mobilisent en masse. Dans les colonnes de « Le Creuset, la voix des cadres », André Maleterre, président la CGC* écrit :
« On ne peut rien sans nous. Un pays ne se gouverne pas sans cadres (…) Il faut, comme il y a 18 mois, apporter la démonstration éclatante qu’ayant la puissance nous sommes prêts à l’utiliser ».
Le 23 mars, la CGC* réunit les cadres à Paris. Devant 6 000 participants, les orateurs peinent à calmer l’indignation. Plusieurs réunions d’information sont organisées parallèlement en région : Lyon, Strasbourg, Marseille, l’Orne, les Vosges, la Normandie, le Nord…
La CGC* demande que le décret soit remplacé par un texte prévoyant une révision annuelle du plafond de la sécurité sociale en fonction des salaires réels. L’action de la CGC unie permet le dépôt d’une proposition de loi contresignée par plus de 440 députés.
«Le gouvernement sait maintenant que l’injustice envers les cadres de ce pays doit avoir une limite».
Solution en bonne voie
Le 12 janvier 1962, après un an de mobilisation, une rencontre entre le Premier ministre et l’ensemble des organisations signataires de la convention collective de mars 1947 est organisée. Les demandes essentielles de la CGC* ont été retenues :
-que le plafond de de la Sécurité sociale ne fasse plus à l’avenir l’objet d’une révision annuelle
– que la révision se fasse en fonction de l’évolution des salaires.
Vous l’imaginez aisément, l’histoire ne s’est pas terminée là et la CGC* a continué de se mobiliser sur ce dossier durant les mois qui ont suivi, en demandant notamment l’application des promesses qui lui ont été faites.
Il n’y a pas d’acquis sociaux
On le constate, la bataille de la retraite a été longue et sinueuse. Elle n’est pas encore terminée aujourd’hui, loin de là, mais elle a enregistré un certain nombre de succès grâce à la mobilisation des femmes et d’hommes qui ont su placer l’intérêt général au-dessus de l’intérêt particulier.
Il nous appartient aujourd’hui, dans un monde qui évolue, de continuer dans cette voie et d’assurer la pérennité de nos régimes de retraite.
* Pour rappel, en 1961, la CFE-CGC est encore « la CGC »